Azhara
par le 17/04/25
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C'est sorti comme ça, entre mon premier carreau de chocolat de la soirée et ma énième clope de la journée : " J'ai peur. "

La peur est normalement un sacré levier chez moi, mais pas là, pas celle-la. Je l'avais déjà identifié il y'a quelques petites semaines, je pensais avoir peur d'avoir de nouveau mal, trop mal. Le comble pour une maso.

La peur de juste subir, d'encaisser, ne pas se dépasser (tiens ça devait déjà commencer à cheminer un peu...), la sensation affreuse "d'être dans le mal", cette expression avait pris tout son sens.

Je me rappelais cette fois où je ne l'avais pas pris avec moi justement, pas dans mon petit moi intérieur. Il était resté en surface, coincé dans des terminaisons nerveuses qui réagissaient... mal !

Il ne me pénétrait pas, pas réellement, il me pénétrait trop. Il prenait le dessus.

Habituellement, je le prends avec moi, en moi, je ne le laisse pas me prendre.
Je l'emprisonne dans mon être, je le développe, je le maîtrise, je le canalise, je le transforme, je le dépasse, j'en fais quelque chose de joli, de rassurant, de réconfortant, de déstabilisant aussi. J'en fais du plaisir tout simplement. Un étrange mélange de lutte et d'apaisement. Je le contrôle.

Parfois je combats, et il finit par abdiquer...
Jamais je ne l'avais laissé gagner.

Voilà j'ai peur, peur que ça se reproduise et peur de ma culpabilité pendant, et celle encore pire de l'après. (Personne n'en parle jamais d'ailleurs de cette maudite culpabilité.)

Coupable, je suis coupable d'avoir peur, pas ma peur habituelle qui me tiraille, celle qui laisse l'envie se mélanger au stress. Pas celle qui me transcende, qui me permet d'entrer dans une drôle de danse interne. Pas celle qui me fait m'interroger sur ce que je fabrique à aimer ça et ne pas fuir. Pas celle où je me demande si je vais vite contrôler la douleur ni comment ça va se passer...


Non, là c'est une peur qui paralyse, qui me paralyse. En fait, je n'ai pas peur d'avoir mal, j'ai peur de ne pas être à la hauteur. 

13 personnes aiment ça.
ZarathoustraDom
J'ai rencontré ce "syndrome" assez souvent chez les femmes soumises : la peur de mal faire, de ne pas en faire assez, de ne pas satisfaire son Dom... Cette peur résulte à mon sens d'un caractère souvent présent chez elles : le perfectionnisme allié à l'altruisme, c'est-à-dire le fait de s'épanouir dans le plaisir donné à l'autre, et dans la perfection de ce don de soi. Parfois, cela conduit la personne soumise à avoir des insomnies, faire des cauchemars, être prise d'une angoisse presque existentielle avant une "séance". Et cette peur de l'échec a pour corollaire la peur de l'abandon (le Dom n'est pas satisfait, donc il va me répudier). Dans certains cas, cela peut même être dangereux, en la conduisant à ne pas exprimer ses limites, à accepter tout (et n'importe quoi, quelquefois !), à entrer dans une spirale infernale du "toujours plus loin et plus fort". Il est évident que le rôle et la responsabilité du Dominant sont alors essentiels, pour détecter cela, et savoir créer les niveaux de confiance, de respect, de dialogue, d'écoute et de bienveillance nécessaires. Mais, à cet effet, il est tout aussi important que la soumise parvienne à exprimer et à verbaliser ces peurs, comme vous le faites ici : c'est la condition nécessaire (mais pas suffisante) pour que le Dominant les écoute ! Au-delà de cela, la femme soumise doit admettre que la perfection n'existe pas, et que l'estime de soi ne doit pas dépendre de la performance. Autrement dit, ce n'est pas la capacité à recevoir sans broncher et sans bouger un plus grand nombre de coups de fouets qui fait la qualité d'une soumise pour son Dom ! Le don de soi est une chose merveilleuse si elle conduit à l'harmonie mutuelle des corps et des esprits des deux partenaires, pas si elle conduit à un cycle pernicieux de frustrations et d'insatisfactions de type "j'ai mal fait, je n'en ai pas assez fait, je n'aurais pas du dire 'non', je ne dois pas poser de limites)... C'est je que je ressens à vous lire, mais bien sûr, je peux me tromper, et n'avoir rien compris à ce que vous vouliez exprimer ! J'espère cependant que ce commentaire vous aura été utile. (NB. Dans tout ce commentaire, j'ai parlé de "la soumise" et "du dominant", parce que c'est mon expérience, mais il est évident que l'on peut élargir au "soumis" et à la "dominante", ou toute autre combinaison)
J'aime 18/04/25 Edité
Chélicère
Ah, culpabilité... Ça j'avoue je ne connais pas... Oui, certains jours le corps encaisse moins bien cette douleur qui reste en surface et n'est pas...acceptée/internalisée/digérée ; chez moi, c'est parfois parce que le mental n'est pas assez formaté pour (c'est compliqué à expliquer, ça n'est pas une question d'envie mais de capacité au relâchement mental chez moi je dirai, au sens de fermer les applis qui n'ont pas à servir à ce moment là^^). C'est factuel, et ça n'engendre pas de culpabilité ; pour le dire trivialement, je n'ai pas merdé, donc je ne peux pas me sentir coupable. Je me sentirai coupable si j'avais menti, dissimulé, ou un truc du genre. Maintenant, coupable d'avoir peur... ? :-) Si elle est là, c'est qu'elle est légitime, il faut peut-être l'accepter et voir où elle mène, à deux ? :-) Et la photo est superbe 1f44d.png
J'aime 18/04/25 Edité
masque_gris
"En fait, je n'ai pas peur d'avoir mal, j'ai peur de ne pas être à la hauteur." Quelle sublime confession. IL a dû être comblé et vous rassurée...?
J'aime 18/04/25
Azhara
Bonsoir ZaraththoustraDom, Je trouve intéressant que vous abordiez le lien entre vouloir être à la hauteur et la posture de soumission. Je crois que c'est effectivement forcément lié. Me concernant c'est justement ce qui définit en partie ma soumission, ce besoin de donner pour Lui... et quand je n'y arrive pas, et peu importe la raison, il y'a une réelle déception, frustration voire une colère contre moi. (Sans m'en rendre malade pour autant moi.) Nous ne sommes pas dans une recherche de performances dans notre bdsm, pas du tout, du tout. C'est même à l'opposé de notre conception... pour plein de raisons. Donc je n'ai jamais eu ce souci de quête de toujours plus et Lui non plus. Par contre, quand d'un point de vue ressentis personnels je bloque, je sais que forcément pour Lui ça va bloquer aussi et ça me paraît bien plus ennuyeux que de ne pas avoir tenu tant de coups de fouets par exemple. Mon " être à la hauteur " était vraiment dans ce sens là. Et on en a évidemment parlé en amont de ce texte, ce qui m'a permis de faire le vide dans la tête et de me quitter ces pensées pourries qui me parasitaient. Merci pour votre avis. 1f642.png
J'aime 18/04/25 Edité
Azhara
Chélicère, j'adore le pragmatisme de " je n'ai pas merdé donc je n'ai rien à me reprocher ", on dirait mon Dominant qui me parle ! Rires ! Et j'ai un petit côté envieuse et jalouse à vous lire. (C'est affreux, je sais.) Je vais tenter de faire ça aussi, me détacher de la culpabilité quand elle n'a aucune raison d'être présente. Ça me paraît on ne peut plus logique sur le papier... Le côté préparation mentale me parle bien aussi. (Et justement mentalement tout était OK donc je n'arrivais pas à identifier clairement ce qui avait pû me faire passer à côté de Lui et de moi-même. Du coup c'était frustraaaaant.) Ahaha elle est partie après un échange, je verrais si elle repointe le bout de son nez ce qu'on peut en faire ^^. Merciiiiiiii
J'aime 27/04/25 Edité
Azhara
Masque_gris, je ne crois vraiment vraiment pas qu'il ait été comblé non. Je crois surtout qu'il a été un peu sidéré en quelques sortes, tout en comprenant ce dont je parlais. Mais je préfère ne pas développer pour ne pas empiéter sur son ressenti. Quant à me rassurer, oui, clairement oui. Il m'a nettoyé la tête. [Sourire]
J'aime 18/04/25
masque_gris
Il faut être un virtuose pour tirer les meilleurs sons d'un Stradivarius. Il doit l'être et il rare de lire que "l'instrument" reconnaisse et avoue " je n'ai pas peur d'avoir mal, j'ai peur de ne pas être à la hauteur"... Félicitations à vous deux.
J'aime 18/04/25
gitane sans filtre
Besoin de digérer avant de m'exprimer, je reviendrai
J'aime 18/04/25
Izelle
Il m'est arrivé une fois où je me sentais mal physiquement où j'ai maintenu une rencontre. Tellement j'en avais envie. Mais j'ai omis de dire que j'étais très fragile ce jour là et la séance a été très compliquée. Moi dans ma peur de mal faire et la culpabilité de décevoir, lui dans son enthousiasme. Aujourd'hui je sais que dire n'est pas médire et être une moins bonne soumise. La rencontre D/s résulte d'une bonne communication et de l'affranchissement de nos réserves enfouies Mais c'est plus facile à dire qu'à faire 😉
J'aime 18/04/25 Edité
Beyourself
"La peur n'évite pas le danger ". Tu as identifié le danger , il te tétanise et puis il y a cette introspection , le dialogue et cette "peur" ne disparait pas , tu ne pourras jamais la faire disparaitre, ce n'est pas une science exacte le bdsm . Nous interagissons avec nos ressentis , nos émotions de l'instant T. Comme tu le dis la perfection ce n'est pas notre truc et nous avançons pas à pas , je te suis , je te pousse , et nous rions beaucoup . Tu n'es jamais "pas à la hauteur" , tu performes simplement de manières différentes et comme une athlète, tu es parfois déçue car tu voulais me montrer ton exploit . Ce que je vois , c'est ton courage , ta combativité malgré ta peur . Merci de m'accorder toute cette confiance , cette rage et cette belle dévotion des moments T. N.B ; je reprendrai bien un peu de "on souffre pas" 1f61b.png
J'aime 18/04/25 Edité
Izelle
Magnifique dialogue... rien d'autre à dire
J'aime 18/04/25
Azhara
Izelle, Ça va être d'une banalité terrible ce que je vais te répondre mais je crois que la " bonne " soumission (si on peut dire ça ainsi) est vraiment basée sur la communication, y compris si celle-ci n'est pas évidente à assumer. C'est dur de dire à son Dominant : " J'ai peur " ou " aujourd'hui je ne suis pas dedans pour telles ou telles raisons ". Je sais que pour moi, quand je lui confie ce genre de pensées c'est aussi ce qui va nous permettre d'avancer... même si la facilité serait de le garder pour moi, mais la facilité ce n'est pas toujours la bonne solution. 1f642.png
J'aime 19/04/25 Edité
Azhara
Beyourself, parfois, par des paroles réconfortantes, elle disparaît bel et bien cette peur 1f642.png... Je te rejoins totalement sur le côté " pas une science exacte " et le dépassement de soi recherché. Je disais à une copine qu'il y'avait une forme d'auto-pression assez ridicule parfois que je me mets, tu le sais. Alors oui quand je me retrouve déçue de ma " prestation " [sourire] ce n'est pas évident à gérer, l'essentiel étant de ne pas rester là-dessus... et ça tu me le permets... Moi aussi pour le vin ^^ et pas que. Oupssss
J'aime 19/04/25
Azhara
MrVinz04, merci pour votre lecture... Les freins au bdsm sont rarement exposés, qu'ils soient mentaux ou physiques : même combat. Je suis completement d'accord, heureusement certaines soumises du site le font ponctuellement. C'est bien souvent des récits qui me touchent particulièrement. Les dérives du bdsm sont rarement mentionnées également et en ça j'ai trouvé intéressant votre article... je ne suis pas certaine d'arriver à développer plus mes pensées sous votre article car mon esprit cafouille un peu en ce moment et j'ai lu dernièrement des aberrations et attaques entre membres. Elles me font bondir et cogiter sur mes interventions ici, afin de rester correcte. 1f642.png (je verrais si j'arrive à décanter 1f642.png) Bien à Vous C'est rigolo de lire ce texte à retardement, j'étais tellement mal avant d'arriver à comprendre d'où venait mon blocage : la peur de décevoir. Je me souviens que l'écrire m'avait totalement libérée, merci pour ce souvenir.
J'aime 30/08/25 Edité